KEY POINTS:
- Plus de 17 millions d'Australiens seront appelés à voter plus tard dans l'année
- Une date précise pour l'organisation du référendum doit être encore fixée
- Le gouvernement table sur le mois d'octobre
Les Australiens seront officiellement appelés à voter pour l'établissement dune Voix aborigène au Parlement au cours des six prochains mois, après le vote d'une loi au Sénat lundi adoptée par 52 voix contre 19.
Le Parlement vient ainsi de passer le dernier obstacle avant l'organisation du référendum, durant lequel les Australiens devront décider s'ils veulent inscrire la Voix dans la Constitution, une demande centrale de la déclaration d'Uluru de 2017.
Pour les partisans du oui, le "travail du Parlement est accompli" et c'est maintenant aux militants de terrain de porter le débat sur cette modification constitutionnelle.
La ministre des affaires Indigènes Linda Burney a estimé que cette nouvelle étape rapprochait encore un peu plus l'Australie d'une reconnaissance des Aborigènes dans la Constitution, un symbole qui ferait "de notre grand pays un pays encore plus grand".
"C'est parti... Aujourd'hui se clôt le débat politique et aujourdh'hui, nous pouvons ouvrir une conversation nationale au niveau de nos communautés", a-t-elle ajouté.
"Pendant trop longtemps, les Indigènes australiens ont été moins bien lotis que le reste de la population. Notre systême ne fonctionne pas et la Voix est le meilleur moyen de changer les choses. Car lorsqu'on écoute les gens sur le terrain, nous prenons de meilleures décisions et nous obtenons de meilleurs résultats".
Le Labor insiste sur le fait que la Voix n'aura qu'un simple rôle consultatif, offrant la possibilité aux Aborigènes de conseiller le Parlement et le gouvernement sur des problématiques les concernant directement.
Mais certains de ses détracteurs pointnent les risques inhérents d'une telle proposition, tandis que d'autres lui reprochent au contraire le peu de pouvoirs dont la Voix sera investie.
Le premier référendum en près de 25 ans se tiendra pas avant deux mois et au plus tard dans six mois à compter de lundi, meme si le Premier ministre a d'ores et déjà précisé qu'il se déroulera cette année, probablement en octobre selon plusieurs médias. .
"C'est une chance unique au cours de notre vie de porter notre nation encore plus haut", sest-il exclamé.

Independent Senator Lidia Thorpe reacts after the passing of the Voice to Parliament in the Senate chamber at Parliament House. Source: AAP / Lukas Coch
"Nous avons là l'opportunité denous améliorer, en faisant des choses non pas pour les Aborigènes mais avec les Aborigènes."
La Coalition toujours opposée à la Voix
Opposés à la Voix aborigène, les élus de la Coalition ont rappelé pourquoi ils considèrent cette réforme dangereuse. Ainsi la Libérale Michaelia Cash craint qu'une victoire du Oui "changerait irrévocablement" la Constitution australienne. Elle reproche également aux Travaillistes de n'avoir livré quasiment aucun détail sur le mode de fonctionnement de cette nouvelle entité représentative.
"Mais nous avons foi en le peuple de cette nation, et en leur droit à s'exprimer sur ce sujet," a-t-elle précisé.
"C'est flou, facteur de divisions et permanent. Si vous ne savez pas comment cette Voix va fonctionner, je vous conseille de voter non".
Jacinta Price, sénatrice aborigène issue de la Coalition, estime pour sa part que laisser au Parlement le soin de définir les prérogatives finales de la Voix, après le référendum, est périlleux sur le plan légal.
"Le Premier ministre veut que nous lui faisions confiance aveuglément et que nous lui signions un chèque en blanc, en lui permettant d'inscrire cette proposition risquée dans la Constitution pour toujours, et ce alors qu'il ne peut rien nous garantir".
Une poignée d'élus de la Coalition ont voté contre cette loi, une manoeuvre de procédure, qui leur permettra de participer à défendre le Non durant la campagne dans des tracts qui seront remis aux électeurs.
Les Verts saluent un "jour véritablement historique"
La porte-parole des élus Verts sur les questions aborigènes, Dorinda Cox, qui préférerait pourtant qu'un Traité et la reconnaissance de la Vérité (tels que définis dans la Déclaratio d'Uluru) vienne avant la Voix aborigène, a salué une "journée véritablement historique" pour les Premiers peuples d'Australie.
"Le travail du Parlement est accompli. Il est temps maintenant que les militants de terrain aillent à la rencontre du peuple et expliquent pourquoi ce référendum est important et pourquoi il est indispensable d'avoir une Voix au Parlement".

Ms Burney, seated left, was present for the debate. Source: AAP / Lukas Coch
Insistant sur le fait que la Voix ne portera pas atteinte à la souveraineté aborigène, elle a été à de multiples reprises interrompue par la désormais indépendante Lidia Thorpe, invitant son ancienne collègue à "prouver" ses affirmations. La sénatrice a récemment claqué la porte des Verts, car en désaccord avec la ligne du parti concernant la Voix aborigène.
Lidia Thorpe torpille une "fausse Voix d'apparat"
La sénatrice Thorpe, une femme DjabWurrung, Gunnai et Gunditjmara, a décrit cette journée de lundi comme "le jour de l'assimilation", enjoint les Australiens de boycotter le référendum et qualifié la loi référendaire de "dernier clou dans le cercueil", tout en se gardant pour l'instant de révéler si elle votera pour ou contre la Voix aborigène.
" Je voterai contre cette idée desastreuse de ne nous donner aucun pouvoir, je ne peux pas soutenir un projet qui ne donne a mon peuple aucun pouvoir. Je ne peux pas soutenir un projet élaboré par ceux qui détiennent le pouvoir".

Minister for Indigenous Australians Linda Burney poses for a photo with 40 members of Jawun at Parliament House in Canberra. Source: AAP / Mick Tsikas
"Oui, je suis ici pour l'infiltrer, pour secouer la fourmilière, pour détruire la suprématie blanche qui est représentée dans ce lieu".
La sénatrice Thorpe, qui portait un T-shirt sur lequel était inscrit le mot "Gammin" pendant les débats, a exigé du Parlement qu'il mette en oeuvre les recommandations de la commission d'enquête sur les morts d'aborigènes en détention.

Independent senator Lidia Thorpe reacts during debate on the Voice to Parliament in the Senate chamber at Parliament House. Source: AAP / Lukas Coch
"Nous entendons toutes ces belles histoires émouvantes sur comment cette Voix va améliorer nos vies. Qu'avant ce référendum, rien d'autre ne peut être fait ... Pendant ce temps pourtant, des enfants sont torturés en prison".
Pendant les débats de lundi, la sénatrice travailliste Malrndirri McCarthy a elle imploré les Australiens à voter oui "à un avenir meilleur" et ajouté que la Voix était "un moment important" pour les personnes indigènes.
"Les aborigènes de nous élever tous ensemble donnent l'opportunité à tous les Australiens de ressentir la fierté de participer à ce moment de notre histoire, de nous tirer vers le haut en permettant aux Premiers peuples de se sentir pleinement intégré à notre société."
Inquiétudes sur le ton du débat après le dérapage de Pauline Hanson
Après que la sénatrice One Nation Pauline Hanson ait appelé les Australiens à "se demander pourquoi" le crime subi par les Générations volées avait été perpétré, la sénatrice McCarthy a admis qu'elle était préoccupée par la teneur des débats dans les mois à venir.
"Je suis un petit peu inquiète quand j'entends certains des commentaires qui sont faits", a-t-elle reconnu.

Senator McCarthy conceded concern over the tenor of the debate, just moments after Pauline Hanson's (pictured) comments. Source: AAP / Lukas Coch
"Ca n'est que dans ces conditions que nous pouvons trouver la meilleure part de nous-mêmes, en tant que pays et en tant qu'Australiens".
Pauline Hanson avait un peu plus tôt affirmé que beaucoup des Générations Volées "n"auraient pas survécu" s'ils n'avaient pas été enlevés à leurs parents.
"Le très détaillé rapport de 1997 "Bringing them Home", avait conclu que l'enlèvement d'enfants indigènes de leurs foyers constitue une violation grave des droits humains, et que les descendants de ces enfants volés étaient plus susceptibles d'être incarcérés, d'avoir des problèmes de santé, et d'être exposés au chômage.
"Je ne compte pas répondre à ces propos, car je ne crois pas qu'ils méritent une réponse du Premier ministre. J'appelle à des débats respectueux à tous les niveaux", a indiqué Anthony Albanese
"Quoi que les gens votent, ceux qui sont engagés dans la campagne doivent s'en tenir au fait, et ne pas dire des choses dont ils savent qu'elles ne sont pas vraies".
Pour Linda Burney, la Voix entraînera un changmeent structurel
Les référendums pour être adoptés, doivent obtenir une double majorité, au niveau national, mais aussi dans chaque Etat. Les habitants des Territoires du Nord et de la Capitale australiennes ne sont pas pris en compte à ce niveau.
Une injustice dénoncée par le sénateur indépendant David Pocock, regrettant que les habitants de l'ACT et du NT ont une voix qui compte moins que celle des autres.
Il a également dénoncé les tentatives de la Coalition de présenter le référendum comme la "Voix de Canberra"
"Ceci est le résultat de l'un des processus les plus consultatifs de l'histoire de l'Australie... Oui, si ça n'est cassé, pas besoin de réparer. Mais si c'est cassé, alors il faut faire quelque chose. Nous avons là l'opportunité de réparer" s'est-il félicité.
Une Voix Indigène au Parlement, c'était l'une des requêtes formulées dans la rédigée par des chefs aborigènes en 2017.
Les Australiens devront voter par référendum plus tard cette année, et voter si Oui ou Non ils sont favorables à une modification de la Constitution pour créer une commission permanente et indépendante chargée de conseiller le Parlement et le gouvernement fédéral sur les problématiques affectant les Aborigènes.
Les contours et les détails de ce modèle seront déterminés par les parlementaires dans l'hypothèse d'un référendum victorieux.
Linda Burney estime que cette proposition permettra de mieux répondre aux inégalités, sur le plan socio-économique, d'espérance de vie, de santé, qui frappent les Aborigènes et les Insulaires du détroit de Torres.
D'après le dernier rapport sur les objectifs du programme Closing the Gap - qui suivent les évolutions des conditions de vie des Aborigènes - paru la semaine dernière, seulement
"Cela nécessite un changement structurel, et la Voix permettra de changer la donne sur des sujets tels que la réduction des inégalités", a-t-elle indiqué.
"Le pouvoir réside dans les principes - pour commencer la Voix bénéficie d'une énorme autorité morale. Elle sera indépendante, et conseillera le parlement mais aussi le gouvernement.
Elle devra rendre des comptes, elle sera équilibrée et dirigée par les communautés. Et elle existera au sein de structures et d'organisations qui existent déjà".
"Débarassez la Voix de la bureaucratie"
Le leader du parti National, David Littleproud, a annoncé en novembre dernier que son parti appellerait à voter Non à une Voix au parlement.
A l'époque, il avait estimé que cette proposition ne "permettrait tout simplement pas de réduire les inégalités".
Il le pense toujours et estime que la solution ne nécessite pas une Voix aborigène inscrite dans la Constitution.
"Les gouvernements ont déversé des milliards de dollars pour résoudre ce problème (les inégalités) mais nous nous y sommes mal pris", a-t-il déclaré sur ABC Radio.
"L'objectif d'une égalité a toujours été là, mais c'est son exécution le problème", a-t-il ajouté, reconnaissant que son parti, membre du gouvernement de la Coalition ces douze dernières années, est en partie responsable de cet échec.
"Nous avons échoué et malheureusement, tous les gouvernements ont échoué. Si on se débarasse de la bureaucratie, on peut réduire les inégalités".
Pour lui la réponse à apporter doit se faire au niveau local et ne requiert pas de Voix au Parlement.
"C'est là que les sages d'une communauté locale, pas au niveau régional, doivent être soutenus et renforcés. Il nous faut débarasser des bureaucrates à Canberra et les mettre autour des mairies et des feux de camp, pour écouter parler ces sages".